Apresentação do editor brasileiro:
O livro
"Para melhor conhecer a geopolítica brasileira" convida o leitor à
compreensão dos pilares do pensamento nacional que têm, em certa medida,
servido de base para a tomada de importantes decisões em nossa república. A
importância de se transferir a capital federal para o interior, a necessidade
de integrar a Amazônia e o posicionamento do Brasil na crise das Malvinas são
exemplos de temas claramente ligados aos pensadores nacionais da geopolítica.
Apresentação da "Conflits", revista francesa de geopolítica:
Officier de l’armée brésilienne, étudiant
à l’École de guerre en France, Mauricio França a publié un ouvrage synthétique
présentant les principaux penseurs de la géopolitique brésilienne. Un ouvrage
bref et dense qui permet d’entrer dans un courant de pensée très peu connu en
France mais très influent au Brésil.
Conflits vous propose des recensions d’ouvrages parus
à l’étranger et non encore traduits en français afin de comprendre les débats
intellectuels qui s’agitent à l’extérieur de nos frontières. Hervé Théry a
rédigé la préface de cet ouvrage et propose ici une recension pour Conflits.
L’auteur, le lieutenant-colonel Mauricio Aparecido França est
un officier d’infanterie de l’armée brésilienne. Après avoir suivi le cursus de
l’École de commandement et d’État-major de l’Armée de terre, à Rio de Janeiro,
il a intégré l’École de guerre à Paris en 2017-2018. Au cours de cette année,
il a aussi obtenu un master à l’École Pratique Hautes Études (EPHE) en menant
des recherches sur l’évolution de la pensée géopolitique brésilienne. À son
retour au Brésil il a eu des fonctions à l’État-Major, à Brasília, et depuis
décembre 2019 il commande le 5e Bataillon d’Infanterie Légère, unité d’élite
aéromobile.
L’idée de ce livre[1] est
née au cours du master de Mauricio França, lorsqu’il a constaté que « nos
auteurs sont inconnus de l’écrasante majorité des universitaires en
Europe ». Il
a alors décidé de combler cette lacune et de produire « une analyse
approfondie des travaux considérés comme les plus représentatifs parmi les
auteurs considérés comme responsables de l’introduction et de la construction
d’une telle école », la géopolitique brésilienne.
A lire aussi : Le Brésil, pays du futur : jusqu’à
quand ?
L’ouvrage porte l’empreinte de cette genèse française.
On évitera de mentionner ici que le patronyme de l’auteur semblait destiné à
étudier dans la patrie de Descartes, mais on peut noter qu’il a bien assimilé
les modes de pensée propres à ce pays, et citer un autre auteur de la même
période, Nicolas Boileau (1636-1711) qui disait « ce que l’on conçoit bien
s’énonce clairement / Et les mots pour le dire arrivent aisément » (Art
poétique, Chant I, v. 153-154).
En effet, le livre de Mauricio A. França est d’une
admirable clarté et se lit facilement, même s’il est probable que les mots ne
sont pas venus à la plume de l’auteur (ou plutôt à son clavier) aussi
facilement, et qu’il a dû suivre d’autres conseils de Boileau : « Vingt
fois sur le métier remettez votre ouvrage / Polissez-le sans cesse et le
repolissez / Ajoutez quelquefois, et souvent effacez », pour arriver à ce texte
clair et concis. Ce faisant, Mauricio França a sans aucun doute atteint son
objectif, « servir de source de référence rapide aux chercheurs sur le sujet ».
Une référence sur la
géopolitique brésilienne
Une autre marque française
possible est l’insistance de l’auteur à établir une séquence logique entre les
idées et les chapitres, ce qui est une habitude – pour ne pas dire une manie –
bien française : « Les auteurs analysés ici sont décrits d’une manière qui
permet une séquence logique. de leurs théories » et « il a été
possible d’identifier l’enchaînement des idées entre les auteurs dans une
construction claire de la pensée ».
Le corps du livre est donc formé par
l’analyse du travail de cinq auteurs qui forment une véritable « école de
pensée » : Everardo Backheuser (1879-1951), Mário Travassos
(1891-1973), Golbery do Couto e Silva (1911-1987), Carlos de Meira Mattos
(1913-2007) et Therezinha de Castro (1930-2000). Tous ont apporté de précieuses
contributions à la construction de la géopolitique brésilienne, sur des sujets
aussi importants – et actuels – que la cohésion interne du pays, la
souveraineté brésilienne en Amazonie, le transfert de la capitale et le réseau
de transport, thèmes qui, selon l’auteur, jusqu’à aujourd’hui, « sont des
sources permanentes de préoccupation au Brésil ». Par exemple, Backheuser,
pensant à l’ordonnancement territorial du Brésil, a suggéré, selon Mauricio
França, « une réorganisation des unités fédératives dans le but
d’affaiblir le pouvoir oligarchique de plusieurs États […]. De plus, il a défendu le
transfert de la capitale du pays vers l’intérieur », bien avant la construction
de Braslia, estimant que « théoriquement le meilleur endroit dans une
capitale est le centre du pays ».
Mário Travassos, Golbery do Couto
e Silva et Carlos de Meira Mattos, qui ont en commun d’avoir été membres du
Corps expéditionnaire brésilien (FEB) en Italie pendant la Seconde Guerre
mondiale, ont également apporté des idées fertiles : les
« antagonismes » géographiques de l’Amérique du Sud. , le
« triangle économique de l’Amérique du Sud », entre les villes boliviennes
de Cochabamba, Santa Cruz de la Sierra et Sucre, l’importance de l’Amazonie
comme zone stratégique, la définition de cercles prioritaires pour un Brésil
qui cherche à s’affirmer comme puissance mondiale. Therezinha de Castro, qui a
travaillé pendant 27 ans au Conseil National de l’Institut brésilien de
Géographie et de Statistique (IBGE) avant de rejoindre l’École supérieure de
guerre, a ajouté une vision originale de l’Antarctique et la thèse de la
triangulation des îles de l’Atlantique Sud, qui fait d’elle « la plus
importante penseuse brésilienne des mers du XXe siècle », ce qui « a
influencé la position du Brésil en faveur des Argentins dans le conflit des
Malouines de 1982 ».
Des penseurs
influents au Brésil
L’auteur identifie donc les
points communs qui marquent la construction d’une pensée véritablement
nationale, en soulignant dans ce contexte le rôle des militaires, dont les
idées sont encore présentes à ce jour. La lecture de son livre permet de
comprendre la formation de personnalités de la scène politique nationale, qui
ont été formées sous l’influence directe de la géopolitique, puisqu’une bonne
partie du premier niveau du gouvernement a été formée à l’Académie militaire
des Agulhas Negras. Certains ont en outre fréquenté l’Escola Superior de
Guerra, véritable berceau de la pensée géopolitique brésilienne, où l’influence
française était si forte qu’elle était souvent surnommée « A
Sorbonne ».
A lire aussi : Pas de puissance brésilienne sans
agriculture
En puisant dans les grands courants de pensée
antérieurs, l’allemand (déterministe), le français (possibiliste),
l’anglo-saxon (au carrefour des deux autres) et sur d’autres sources, comme
Arnold J. Toynbee (mise en perspective et théorie des « défis et
réponses »), ils (et elle) ont réellement construit un cadre théorique
capable de prendre en compte les atouts du Brésil, selon l’auteur : « sa
dimension géographique qui lui confère une grande variété de ressources ;
sa population, qui représente une énorme force de travail ; sa capacité
technologique […] et sa cohésion interne ». Ce qui, selon Mauricio A.
França, « étaient des facteurs qui justifiaient l’optimisme des auteurs ».
Leur optimisme doit être – pensons-nous – partagé par
Mauricio França, on le pressent malgré la discrétion qu’il garde tout au long
du livre. Cette hypothèse nous semble confirmée par les dernières lignes de
l’ouvrage : « Certes, de nouveaux auteurs continueront cette chaîne d’idées,
améliorant des concepts déjà figés et dépassant de loin leurs prédécesseurs.
L’avenir du Brésil est arrivé ! ». Il prend ici le contrepied d’une
citation, « Le Brésil, un pays d’avenir et qui le restera
longtemps », dont l’origine est tantôt attribuée à Georges Clemenceau,
tantôt à Charles de Gaulle, et souvent citée au Brésil. À la lecture de son
livre, qui montre que les auteurs qu’il cite ont trouvé un successeur digne
d’eux pour poursuivre la réflexion géopolitique sur le Brésil, on ne peut qu’être
d’accord.
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