A palavra ao parisiense "Wolf":
Une bombe à retardement: Les provinces chinoises ont accumulé près de 5000 milliards d’euros de dettes et 22 % des logements sont vacants
THE WOLF | Paris | 14/11/2018
En Chine, la spéculation immobilière et la frénésie de
construction qui ont sévi pendant des années ont mené à un résultat effarant:
22% des logements du pays sont vacants. Cette situation pose le risque de
l’effondrement rapide du marché immobilier en cas de choc.
«Les maisons sont construites pour être habitées, pas
pour la spéculation», a déclaré le président chinois Xi Jinping en octobre.
Mais sa déclaration semble un peu tardive: pendant des années, les Chinois ont
massivement investi dans l’immobilier. Les efforts des autorités chinoises pour
mettre fin à cette tendance, notamment en prenant des mesures pour dissuader
les achats de multiples biens immobiliers, semblent avoir échoué.
Des
villes fantômes et un taux de vacance record
Cette frénésie immobilière est notamment à l’origine
de l’apparition des dizaines de villes fantômes qui sont sorties de terre
depuis le début de ce millénaire. (Notre photo de couverture
est une photo de la ville de Kangbashi, en Mongolie intérieure. Cette ville, assez vaste pour accueillir un million
d’habitants, n’en comptait que 153 000, selon Wikipedia. Elle
est l’une des dizaines de villes fantômes construites par le gouvernement
chinois pour tenter de faire migrer les gens de la campagne vers les villes (et
les usines).
Une
étude nationale à paraître prochainement, menée par le professeur Gan Li de
l’Université d’Economie et de Finance du Sud-Ouest de Chengdu, montre
qu’environ 22% des logements sont vacants en Chine. Cela représente plus de 50
millions de propriétés. «Aucun autre pays ne présente un tel taux de vacance»,
affirme Gan, qui redoute qu’en cas de doute sur le marché, les propriétaires
risquent de se débarrasser en masse de leurs biens, ce qui pourrait provoquer
un effondrement rapide des prix de l’immobilier.
En pratique, la situation n’est pas nouvelle. Déjà
en 2013, la même étude avait abouti à un taux de vacance de 22,4%,
correspondant à 49 millions de logements.
Une
partie de ces habitations sont des résidences secondaires, une autre correspond
aux logements de migrants et d’expatriés ayant quitté le pays. Mais selon Gan,
les achats de biens immobiliers à titre de placement sont un facteur
déterminant du taux élevé de vacance chinois.
Une
bulle immobilière… prête à éclater au moindre choc
Ce
dernier implique également que l’offre de logements ne correspond pas à ce
qu’elle devrait être en réalité, ce qui pousse les prix à la hausse, et empêche
les jeunes de devenir propriétaires. Des millions d’acheteurs potentiels sont
donc exclus du marché en raison de l’existence d’une véritable bulle
immobilière, et des prix exagérés de l’immobilier qui en résulte.
Au
cours de cette décennie, le gouvernement a investi des milliards de dollars
dans le secteur de la construction pour stimuler la croissance économique du
pays, en misant sur l’émergence de la classe moyenne chinoise pour acquérir les propriétés bâties. En effet, cette classe moyenne chinoise s’est constitué une épargne qu’elle n’a pas le droit
d’investir à l’étranger, et elle craint d’investir sur les marchés financiers
très volatiles. Influencées par la hausse constante de l’immobilier par le
passé, beaucoup de familles ont acheté plusieurs appartements dans l’espoir que
leur valeur augmente.
Un autre problème, c’est que ces logements vacants ne
sont pas tous entretenus et, lentement mais sûrement, ils commencent à se
dégrader.
Les analystes redoutent que tôt ou tard, cette bulle
immobilière gigantesque éclate, ce qui ruinerait des millions de Chinois
propriétaires.
Une
bombe à retardement: Les provinces chinoises ont accumulé près de 5000
milliards d’euros de dettes
Les
gouvernements des provinces chinoises ont accumulé près de 40 000 milliards de
yuan (environ 5 000 milliards d’euros) de dettes en sus des dettes qui leur
sont accordées par le gouvernement central à Pékin. C’est la conclusion d’un rapport de Standard &
Poor’s (S & P). La Chine a annoncé qu’elle prendrait des mesures pour
mesurer, évaluer et contrôler la dette du gouvernement local.
«Un iceberg de dettes avec des risques de crédit titanesques»
(en anglais, titanesques se dit «Titanic», ce qui permet de faire un joli jeu
de mots…), écrit l’agence de notation dans son rapport. Celui-ci
indique que lorsque l’on ajoute cette dette cachée par les gouvernements des
provinces chinoises, le ratio d’endettement public par rapport à la taille de
l’économie chinoise pourrait avoir franchi le seuil «alarmant» de 60% l’année
dernière.
Des dettes hors bilan
On
considère en effet que cette dette est dissimulée, car les crédits
correspondants ont été sollicités en sus du quota annuel approuvé par le
gouvernement central à Pékin. Bien
souvent, ils ont été accordés par des moyens alternatifs, n’ont pas fait
l’objet d’émission d’obligations, et ne figurent pas au bilan des provinces. A
la fin de l’année dernière, l’encours de la dette publique en Chine s’élevait à
29 950 milliards de yuans (environ 3784 milliards d’euros), dont 16 500
milliards de yuans (environ 2084 milliards d’euros) correspondent aux emprunts
officiels des autorités locales, levés au moyen d’émissions obligataires depuis
2015. Mais
à cela, il faut rajouter 30 000 à 40 000 milliards de yuans (de 3 800 à 5 000
milliards d’euros) de crédits non officiels.
La croissance chinoise commence à
ralentir
Il
faudra sans doute mettre en place des programmes de remboursement stricts pour
éponger de telles montagnes de dettes, mais pour le moment, peu de progrès ont
été réalisés, note S & P dans son rapport. Or, la croissance chinoise a
commencé à se ralentir, ce qui suggère que les niveaux d’endettement menacent
d’augmenter encore davantage au cours des prochains mois. La guerre commerciale
que le pays a engagée avec les Etats-Unis n’arrangera rien.
Le
gouvernement central chinois a déjà réalisé des dépenses d’investissements dans
des projets d’infrastructure de grande ampleur pour soutenir l’économie au
cours des derniers mois, ce qui signifie qu’il risque d’épuiser les réserves de
liquidités des banques chinoises. Mais Pékin clame que cette politique de
relance ne l’empêchera pas de prendre des mesures en parallèle pour assainir le
système bancaire du pays.
La Chine est elle-même un titan de la dette, et
l’année dernière, son ratio d’endettement total a atteint 255%. L’Empire du
Milieu a commencé à augmenter les impôts pour tenter de juguler sa hausse, en
particulier dans le secteur du divertissement, la sécurité sociale et le
secteur immobilier.
«
La dette des provinces devrait être l’une des priorités les plus urgentes des
dirigeants chinois »
Néanmoins, les agences de notation ont déjà sanctionné
les gouvernements régionaux et locaux. En septembre, Standard & Poor’s a
dégradé d’un cran la cote de sept instruments financiers offshore émis par les
villes de Chongqing et Tianjin et les provinces de Jiangsu et du Hunan. Le
même mois, Moody’s a également dégradé
la note de cinq entreprises étatiques de Tianjin, Jiangsu, Hunan et Hubei. Le
gouvernement chinois a interdit aux autorités locales de renflouer ces
véhicules financiers en cas de difficultés.
«La
réduction des risques financiers, y compris la dette dissimulée des
gouvernements locaux, devrait être l’une des premières priorités des dirigeants
chinois», conclut S & P dans son rapport. L’agence estime qu’il faudra au
moins une dizaine d’années à la Chine pour régler le problème des dettes
cachées des autorités locales.
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