O milenar jogo de “Go”
é a matriz da estratégia chinesa de conquista do mundo. Explicações de Christian
Harbulot, Alain Juillet e outros.
“Comment, en une quarantaine d’années, la Chine a quitté son statut de pays en voie de développement et s’est hissée au premier plan, à une vitesse extraordinaire, grâce à une stratégie clairement revendiquée par le dirigeant actuel, Xi Jinping: «La diplomatie chinoise est comme le go.»
Un jeu chinois millénaire dont Christian Harbulot, directeur de l’École de Guerre Économique, rappelle le principe d’encerclement: «Encercler, ça veut dire créer une logique de suprématie acceptée.
Mais ça ne veut pas dire détruire et soumettre.» Un «jeu qui dure longtemps», rappelle Wang Yiwe, délégué de la mission chinoise auprès de l’Europe (2008-2011), et où l’«on se moque des petites défaites et des petites victoires».
Tout débute en 1975 avec la visite de Deng Xiaoping en France. Le leader chinois a acquis la conviction qu’il peut sortir son pays du sous-développement en l’ouvrant sur le monde.
«Il vient avec une idée en tête, se souvient Claude Martin, ancien ambassadeur de France à Pékin. Acheter des technologies, acheter des usines, ouvrir la Chine au monde moderne.» Après la mort de Mao, il met son plan à exécution. Il sollicite l’aide de la Banque mondiale, et lui annonce son ambition: multiplier en vingt ans le PIB par quatre.
«Den Xiaoping était avant tout un visionnaire, souligne Alain Juillet, ancien directeur du renseignement à la DGSE. La stratégie qu’il a écrite et expliquée à l’époque était celle que les Chinois ont appliquée jusqu’à aujourd’hui.»
Alléchés par cet énorme marché, les Occidentaux se ruent en Chine, acceptent des transferts massifs de technologies et ferment les yeux sur les violations des droits de l’homme. À l’image de Jacques Chirac, premier chef d’État occidental à rendre visite à Jiang Zemin après les événements de la place Tian’anmen, en 1989.
En 2001, l’OMC accueille en son sein la République populaire de Chine, qui accepte de faire des concessions à ses nouveaux partenaires économiques avant d’avancer de nouveaux pions…
Une stratégie à long terme
Car bientôt il devient urgent de capter les bénéfices générés au profit des entreprises étrangères… «On devait fabriquer 800 millions de chemises pour acheter un Boeing, raconte Tao Weibin, journaliste économique indépendant. Alors on s’est demandé si le moment n’était pas venu d’améliorer notre mode de développement.» Objectif: la maîtrise des industries de pointe.
Avec le train à grande vitesse, la Chine réussit un coup de maître en faisant jouer la concurrence étrangère, alléchée par «le contrat du siècle», accélérant ainsi le transfert de technologies. Mais aucune entreprise étrangère ne rafle la mise, car le pays communiste est désormais en mesure d’inaugurer en 2011 son propre TGV: le Pékin-Shanghai.
«La culture de la copie est dans la culture chinoise, explique Claude Martin. Donc c’est très dur de développer une vraie politique de la protection intellectuelle.»
Le règne de Xi Jinping
L’élection de Xi Jinping marque le début d’une nouvelle ère: il affiche d’emblée son ambition de donner à la Chine la place de première puissance mondiale et affirme son autoritarisme. Il n’a aucune clémence pour le prix Nobel de la paix et intellectuel Liu Xiaobo, qui meurt en prison sous les caméras du monde entier.
«C’est vraiment la fin des illusions!» résume François Bougon, journaliste de l’AFP à Pékin (2005-2010),
«La Chine est très puissante. Qu’elle soit vertueuse ou pas n’a aucune importance, précise le dissident syndicaliste Cai Chongguo. Il suffit que tout le monde nous craigne, reconnaisse nos succès.»
En quarante ans, le salaire moyen d’un Chinois a été multiplié par 100. Et la Chine continue de tisser sa toile autour du monde.
«Il faut mesurer le renversement stratégique que cela représente, explique l’ancien ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire. Aujourd’hui, la totalité des investissements financiers de la Chine en Afrique est supérieure à l’ensemble des investissements de la Banque mondiale. Ça veut dire qu’à un ordre occidental s’est substitué un ordre chinois.»
En 2013, Xi Jinping lance les nouvelles routes de la soie devant un parterre de plus de 1 500 chefs d’État étrangers. Pour échapper à la mondialisation occidentale, ce projet titanesque de réseau de nouvelles routes est destiné à favoriser les échanges commerciaux entre la Chine et le reste du monde. «C’est Marco Polo à l’envers !»
Xi Jinping ne limite pas la présence chinoise au marché : en 2017, il inaugure la première base militaire chinoise à Djibouti. Mais c’est bien une guerre économique qui va bientôt se jouer entre la Chine et les États-Unis qui voient leurs positions mises en péril…”
Continua no site de Philippe Sollers: